Un livre pour humer et admirer le Japon

Notes découpées du Japon, l'avis des journalistes.

 

Coup de cœur de la rentrée du Journal du Japon

"Pour mettre un peu de Japon et de poésie dans votre quotidien, rien de tel que ces notes découpées qui dressent un portrait émouvant du Japon sous les yeux d’un Français qui s’y est installé.

Le contenu du livre est très bien résumé par la première page :

Ce soir, à l'izakaya, ce conseil de Tateki : si un jour tu veux raconter le Japon, prends des ciseaux, coupe des petits et des grands morceaux et jette tout en l'air.

Accompagnés des superbes encres de Chine de Junko NAKAMURA connue pour ses illustrations d’ouvrages pour la jeunesse, les textes évoquent toutes les facettes d’un pays attachant : aquatique avec ses lacs, ses rivières, ses sources chaudes, mais également ses typhons et ses vagues destructrices, gastronome avec ses nouilles, ses biscuits, ses gelées comme des rivières, et surtout habité par des Japonais qui fascinent l’auteur lorsqu’ils dorment pendant le spectacle de Kabuki, aiment apprendre le français pour la complexité de sa conjugaison ou somnolent épaule contre épaule dans le train qui les ramène chez eux après une grosse journée de travail.

Les paysages peints prennent vie sous les yeux du lecteur grâce aux encres de Chine : un ciel noir mité de points lumineux pour évoquer le spectacle des lucioles, des feux d’artifice comme des fleurs géantes, les zébrures d’un typhon ou la vague noire du 11 mars 2011.

Il y a aussi parfois plein de petits personnages pour représenter les foules d’un matsuri, fête estivale en français, ou celles qui se pressent sous les cerisiers en fleur pour hanami. Des scènes plus intimistes montrent un paysage aperçu en entrouvrant les shôji, une amie qui attend devant une vieille boutique, un vieil homme qui porte sa femme qui ne peut plus marcher, un homme qui court en tous sens comme le lapin blanc d’Alice au pays des merveilles.

Parfois, seuls les objets sont peints : un verre de saké en l’honneur d’un défunt, un bol de nouilles préparé par un cuisinier mystérieux, une tasse de thé lors d’un tremblement de terre.

Juste pour le plaisir, voici un extrait sur une promenade de printemps :

C’est le premier beau jour du printemps et nous décidons de faire une balade à vélo dans le quartier. Nous quittons l’avenue et prenons le chemin piétonnier qui passe dans le dos des maisons et coupe à travers des ruelles et des sentiers étroits. Des marches en bois ou en pierre descendent des jardins sur la voie. Les maisons sont dissimulées par les arbres et les haies de bambous. Leur entrée officielle, plus large et plus sérieuse, se trouve de l’autre côté.
Par-dessus les murets et les barrières, dans les jardins, les vêtements et les draps sèchent sur des fils dans les coins de soleil.
Des promeneurs et des joggeurs se reposent sur les bancs faits d’un bloc de béton, près du tronc noir des cerisiers. De la mousse vert sombre pousse sur les dalles d’égout et cela leur donne un air ancien et noble, elles pourraient être plantées dans les graviers du Ryoan-ji. Nous dépassons des parcs pour enfants où sont abandonnés de longues balançoires jaunes à tête de chien et des toboggans en ciment coloré qui ont des formes de dinosaures. À notre passage, les fleurs d’un buisson s’envolent en papillons. Plus loin, après le passage à niveau, nous achetons des gâteaux parfumés à la pêche dans une épicerie; Ce sont des brioches pâteuses, beaucoup trop sucrées, des éponges asséchées à peine comestibles, et nous nous régalons.

Un petit livre pour humer et admirer le Japon."

par Alice Monard

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Une lecture sur le blog de libraires Le Triangle Masqué

"« La secousse est progressive. Le sol, les murs et les meubles tremblent, les objets et les vitres commencent à tinter puis tout se calme d’un coup. »

Ce ressenti sismique pourrait être une parfaite définition de la structure de ces fragments de vie nippone. Qui auraient très bien pu s’intituler Petits haïkus en prose. Sans avoir l’air d’y toucher l’auteur nous mène souvent de la singularité d’une scène typiquement japonaise à l’incongruité d’une chute paradoxale.

« Cette fois rien n’est tombé, rien ne s’est cassé ni brisé, sauf la bonne humeur et les rires. »

Les thèmes développés, bizarreries du quotidien, réminiscences de l’Histoire, beauté de certains instants, émerveillements de la Nature, font également écho à l’art subtil de la poésie japonaise. De petits riens et des Grand Tout qu’il faut savoir appréhender avec justesse et patience.

« En équilibre sur les fils de l’étendoir, les couches de neige se dressent fines, merveilles infimes élevées flocon après flocon. »

Enseignant le français au Japon, Benoît Reiss nous restitue dans ces courts textes (agrémentés d’encres de Chine qui font aussi de ce livre un bel écrin) son expérience et son amour de ce pays et de ses habitants. Ainsi ressort de cette lecture toute la délicatesse de qui sait voir, écouter et ressentir au filtre d’une culture singulière, si différente et si attirante.

« un instant les mots sortis des bouches sont devenus visibles ; plus légers que l’air, ils montaient dans les feuillages avant de retomber, attachés aux pétales et aux feuilles. »

Lolqat

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Et sur le site de l'AREAW, un bel article signé Isabelle Bielecki !

"Les titres qui offrent une double interprétation me laissent rêveuse. Le premier mot de « Notes découpées du Japon », titre du livre de Benoit Reiss illustré par Junko Nakamura et publié aux éditions Esperluète, peut se comprendre comme notes de musique, ce qui serait vrai et juste, mais aussi, et ceci est l’intention de l’auteur, comme impressions fugaces, petites touches captées au jour le jour d’un pays mystérieux, qui ne se livre pudiquement qu’après des années de cohabitation silencieuse : le Japon.

« Si un jour tu veux raconter le Japon, prends des ciseaux, coupe des petits et des grands morceaux et jette tout en l’air » nous confie l’auteur en page 7 avant de nous emmener en promenade. Et l’on suit cet homme, Benoît, que l’on imagine grand gaijin entouré d’une multitude de sourires polis, dans sa découverte tâtonnante d’un monde épuré à l’extrême.

Que découvrons-nous à travers ces notes ? Du tragique ? Du dramatique ? Du drôle ? Ou la douceur du quotidien, mystérieux comme un haïku, indolent comme une carpe koï nageant à la surface de l’eau, serein comme un jardin de cailloux Zen. Ces pages, faites de petits riens que les noms en japonais habillent, certes, d’exotisme, nous rappellent que notre vie à tous, de ce côté-ci du globe pareillement, est faite de respirations, de nonchalance, de détails, que courir après les sensations fortes camoufle le bonheur de vivre en pointillé.

Ainsi se déroule la vie sereine de l’auteur attentif, curieux, à petits pas oserais-je ajouter, rappelant ceux des geishas qui glissent pareillement dans les estampes japonaises ou les rues de Kyoto. Hors du temps.

Chaque page se termine soit par un paragraphe blanc, des blancs qui sont autant de passerelles qui font rêver, se souvenir si l’on a visité le Japon ou deviner ce monde aux antipodes du nôtre. Ou alors par les beaux dessins de Junko qui habillent avec amour la page de noir avec une application des calligraphes de son pays. L’on imagine dans sa main le pinceau épais, posé fermement sur le papier qui boit un peu de son encre, puis le tracé net, sans hésiter pour coller aux mots, les ourler de son image.

« Je passe un moment penché sur le présentoir à regarder ces cartes postales : sur chacune la vision se dérobe, glisse, chaque image est en même temps plusieurs, et je sens qu’à force de les examiner, ces cartes ouvrent en moi un passage par où s’échappe un faisceau de désirs ; il va dans toutes les directions, vers toutes les rencontres possibles » écrit l’auteur en page 72. Il en est de mêmes des notes de ce petit livre, à la fois poésie et impressions de voyage, dont chaque relecture dévoile un subtil détail, une nouvelle observation faite pour nous au Pays du Soleil Levant."

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